Si vous n’avez pas encore eu la chance de vous amuser aujourd’hui, c’est maintenant! Le Docteur Grégory Pamart, membre de RéinfoCovid-France, a eu l’idée saugrenue de plonger dans son Code de Déontologie médicale (1), non pas pour s’arrêter aux articles eux-mêmes mais pour se délecter de leurs commentaires, écrits il y a des années par des médecins qui transpiraient à chaque ligne la compétence, la bienveillance et l’esprit d’engagement professionnel. Au final on réalise que les conseillers ordinaux actuels, toute à leur lecture politico-administrativo-dictatoriale du Code, devraient comprendre que précisément leurs positions les installent à l’exact opposé de l’esprit qui a présidé à la rédaction de celui-ci. Plongeons ensemble dans les abysses des contradictions ordinales actuelles, bonne lecture.

Grégory Pamart : Introduction

Lors de périodes paisibles, quand seule la lecture prudente du passé pouvait laisser présager que de nouvelles dérives autoritaires pourraient frapper notre continent, des hommes pour qui l’honneur et la probité de la profession de médecin garderaient toujours un sens, ont placé dans les commentaires du Code de Déontologie Médicale les mots qui serviraient un jour de rempart contre d’injustes accusations.

Nous vous en proposons quelques extraits sans commentaire… Lisons… Relisons ces mises en garde.

Article 1

  • « Les dispositions du présent code s’imposent aux médecins inscrits au tableau de l’Ordre, à tout médecin exécutant un acte professionnel dans les conditions prévues à l’ article L.4112-7 du code de la santé publique ou par une convention internationale, ainsi qu’aux étudiants en médecine effectuant un remplacement ou assistant un médecin dans le cas prévu à l’ article 88. Conformément à l’ article L.4122-1 du code de la santé publique, l’Ordre des médecins est chargé de veiller au respect de ces dispositions. Les infractions à ces dispositions relèvent de la juridiction disciplinaire de l’Ordre. »

Commentaire de l’article 1 – Champ d’application du code
Ce pouvoir de juridiction confié à des médecins les engage profondément. C’est sur eux que les pouvoirs publics comptent pour éviter des abus préjudiciables aux patients et à la société ; c’est sur eux, également, que les médecins comptent pour que soit respectée, dans l’exercice d’une responsabilité toute personnelle, leur liberté de décision en présence du patient.

Article 2

  • « Le médecin, au service de l’individu et de la santé publique, exerce sa mission dans le respect de la vie humaine, de la personne et de sa dignité. Le respect dû à la personne ne cesse pas de s’imposer après la mort. »

Commentaire de l’article 2 – Respect de la vie et de la dignité de la personne
Il doit être un acteur vigilant et engagé dans la politique de santé publique, qu’il s’agisse de la prévention, de l’épidémiologie ou de l’éducation à la santé. Toutefois, le médecin doit se garder, dans cette action de santé publique, des effets pervers d’une prévention collective autoritaire.
[…]
Cette primauté de l’être humain par rapport à la société est réaffirmée dans la convention sur les droits de l’homme et la biomédecine en ces termes : “ l’intérêt et le bien de l’être humain doivent prévaloir sur le seul intérêt de la société ou de la science ”.
[…]
L’imprudence thérapeutique médicale ou chirurgicale est sanctionnable. Cependant la prise de risque est un facteur de progrès, mais à certaines conditions : que ce risque soit identifié, évalué par le médecin, proportionné à la gravité de la maladie, annoncé avec loyauté au patient, afin que celui-ci donne un consentement éclairé.

L’intérêt et le bien de l’être humain doivent prévaloir sur le seul intérêt de la société ou de la science

Article 5

  • « Le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit. »

Commentaire de l’article 5 – Indépendance professionnelle
Pourtant, si l’indépendance du médecin est rarement contestée – tant il est naturel et semble évident que le médecin agisse et décide selon sa conscience pour soulager, guérir, prévenir – l’histoire apprend qu’elle fut souvent menacée, y compris en Europe, et qu’elle peut encore l’être à l’heure actuelle dans le monde.
[…]
Un médecin ne doit pas accepter une position subordonnée telle que sa liberté de jugement et d’action puisse se trouver amputée ou orientée. À une époque où le besoin de sécurité développe des formes nouvelles d’exercice, le corps médical doit continuer à préserver son indépendance professionnelle, sans en sacrifier une partie pour une meilleure stabilité personnelle.

Un médecin ne doit pas accepter une position subordonnée telle que sa liberté de jugement et d’action puisse se trouver amputée ou orientée.

[…]
Le médecin doit toujours agir dans le sens dicté par l’intérêt premier du patient et ne peut pas se laisser considérer comme un agent d’exécution au service d’autres intérêts qui deviendraient prépondérants. Il s’agit là d’un état d’esprit auquel il convient de veiller sans cesse. »

Article 7

  • « Le médecin doit écouter, examiner, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient leur origine, leurs moeurs et leur situation de famille, leur appartenance ou leur non-appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap ou leur état de santé, leur réputation ou les sentiments qu’il peut éprouver à leur égard. Il doit leur apporter son concours en toutes circonstances. Il ne doit jamais se départir d’une attitude correcte et attentive envers la personne examinée. »

Commentaire de l’article 7 – Non discrimination
Tout refus de soins fondé sur un motif de discrimination est passible de sanctions disciplinaires, voire pénales.
[…]
Aucune discrimination n’est non plus acceptable selon l’état de santé ou un handicap. Un patient qu’il soit contagieux, atteint de troubles cognitifs ou psychiatriques doit être aussi bien traité qu’un autre patient.
[…]
En cas d’épidémie, quand bien même il existerait un risque pour le médecin, celui-ci ne peut s’y soustraire. La tradition médicale a toujours été de faire face, d’être présent et de soigner en se gardant de risques évitables, mais sans fuir les risques inévitables.

Tout refus de soins fondé sur un motif de discrimination est passible de sanctions disciplinaires, voire pénales.

Article 13

  • « Lorsque le médecin participe à une action d’information du public à caractère éducatif, scientifique ou sanitaire, quel qu’en soit le moyen de diffusion, il ne fait état que de données confirmées, fait preuve de prudence et a le souci des répercussions de ses propos auprès du public. Il ne vise pas à tirer profit de son intervention dans le cadre de son activité professionnelle, ni à en faire bénéficier des organismes au sein desquels il exerce ou auxquels il prête son concours, ni à promouvoir une cause qui ne soit pas d’intérêt général. »

Commentaire de l’article 13 – Information du public
Il est en effet hautement souhaitable que les médecins soient présents dans l’espace public et apportent leurs connaissances et le fruit de leur expérience dans tous les débats touchant au domaine de la santé et dans tous les champs de ce dernier, préventif, thérapeutique, scientifique, technique, environnemental.
[…]
Ce principe n’interdit pas au médecin, comme il ressort des dispositions du II de l’article R. 4127-19-1, de faire part d’incertitudes, d’hypothèses ou de résultats provisoires de travaux de recherche, dès lors que les informations ainsi portées à la connaissance du public, à défaut d’être fondées sur des données confirmées, le sont sur des données scientifiquement étayées et établies dans le respect des exigences déontologiques et scientifiques de la recherche médicale, et à la condition que le médecin fasse expressément mention de leur caractère incertain, hypothétique ou provisoire, et selon quel degré.

Il est en effet hautement souhaitable que les médecins soient présents dans l’espace public et apportent leurs connaissances et le fruit de leur expérience dans tous les débats

Article 32

  • « Dès lors qu’il a accepté de répondre à une demande, le médecin s’engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s’il y a lieu, à l’aide de tiers compétents. »

Commentaire de l’article 32 – Qualité des soins
Ces « données acquises de la science » ne représentent pas pour autant des références claires, simples, indiscutables et définitives. Le propre de la science est d’être exposée à contradiction et de pouvoir évoluer.
[…]
Pourtant, cette science médicale ne doit pas se voir attribuer une portée absolue. Elle donne des indications générales guidant le médecin face à un patient particulier et n’impose pas qu’on les applique sans esprit critique. Cela signifie qu’elles seront suivies simplement dans la plupart des cas, tandis que pour les autres patients le médecin s’en inspirera pour personnaliser une conduite à tenir en y apportant les nuances de l’art médical. Ces nuances ne sont pas le fruit d’une inspiration personnelle extemporanée, elles doivent pouvoir être justifiées sur des critères objectifs.

Article 36

  • « Le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas. Lorsque le malade, en état d’exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposés, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences. Si le malade est hors d’état d’exprimer sa volonté, le médecin ne peut intervenir sans que la personne de confiance, à défaut, la famille ou un de ses proches ait été prévenu et informé, sauf urgence ou impossibilité. Les obligations du médecin à l’égard du patient lorsque celui-ci est un mineur ou un majeur faisant l’objet d’une mesure de protection juridique sont définies à l’article R. 4127-42. »

Commentaire de l’article 36 – Consentement du patient
Conformément à l’article 16-3 du code civil : « Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l’intérêt thérapeutique d’autrui. »
Le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir. ». Le patient a le droit d’accepter ou de refuser ce que le médecin préconise et non lui impose.
[…]
Le fait d’intervenir sur un patient contre son consentement est pour un médecin une faute qui engage sa responsabilité civile et l’expose à une sanction disciplinaire.

Le patient a le droit d’accepter ou de refuser ce que le médecin préconise et non lui impose.

Article 48

  • « Le médecin ne peut pas abandonner ses malades en cas de danger public, sauf sur ordre formel donné par une autorité qualifiée, conformément à la loi. »

Commentaire de l’article 48 – Continuité des soins en cas de danger public
D’ancienne tradition médicale, cette présence du médecin face à une épidémie, malgré les risques auxquels elle l’expose, doit être régulièrement rappelée. Naguère des médecins traitant des tuberculeux ont pu être contaminés et éventuellement mourir de tuberculose pour avoir fait leur devoir. […] Il a toujours été et il reste à l’honneur des médecins de ne pas les fuir.

Il a toujours été et il reste à l’honneur des médecins de ne pas les fuir.

Article 49

  • « Le médecin appelé à donner ses soins dans une famille ou une collectivité doit tout mettre en oeuvre pour obtenir le respect des règles d’hygiène et de prophylaxie.
    Il doit informer le patient de ses responsabilités et devoirs vis-à-vis de lui-même et des tiers ainsi que des précautions qu’il doit prendre. »

Commentaire de l’article 49 – Hygiène et prophylaxie
Le médecin doit faire tout son possible pour convaincre un sujet infecté de ses responsabilités. Malgré des propositions périodiques de dénonciation ou d’isolement, peu réalistes ou illusoires, rien ne peut remplacer la prise de conscience par le patient des risques auxquels il expose son entourage et des précautions qu’il lui revient de prendre pour les limiter et si possible les supprimer.

Malgré des propositions périodiques de dénonciation ou d’isolement, peu réalistes ou illusoires…

Grégory Pamart : Conclusion

Il est une chaleur rassurante de trouver ces mots autour du Code de Déontologie. Nous y trouvons un lieu commun pour tous les médecins: l’amour de leur art, de la personne souffrante, et l’envie de bien faire. 
Souhaitons que nous parvenions à nous réconcilier dans ce lieu commun. Que nous soyons rassurants face au risque infectieux et prudents face aux propositions sanitaires, ou inquiets face à la pandémie et rassurants face aux propositions gouvernementales, nous pouvons trouver au delà de nos désaccords le même désir premier de servir. Finalement chaque patient est unique et nos diversités de soignants sont une richesse pour y répondre. L’uniformité quant à elle représente un terrible danger.

Nous espérons que l’institution ordinale redécouvrira comme nous les trésors de ce code de Déontologie et de ses commentaires, car enfin, l’Ordre des Médecins n’est pas le préfet du gouvernement et surtout pas une police des idées, mais bien le garant de la Déontologie, de l’Ethique et de la grandeur de la Médecine dans la beauté de sa diversité.

Dr Grégory Pamart
Novembre 2021

 

 

 

Notes et sources:
(1) https://www.conseil-national.medecin.fr/code-deontologie

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