Retrait in extremis de la candidature du Dr David Weldon pour le CDC : le lien entre autisme et vaccins en question

La guerre d’influence fait rage à Washington entre les médecins épris de vérités scientifiques d’un côté et les industriels du médicament de l’autre (*), ces derniers jouant tout simplement leur survie. Laisser passer la nomination du Dr Dave Weldon à la tête des CDC, après n’avoir pas pu empêcher celle de Robert Kennedy Jr. aurait confiné à une disparition certaine. Mais Big Pharma semble avoir remporté une bataille capitale cette semaine, comme d’habitude… Bonne lecture.    

Douze heures avant l’audience de confirmation prévue au Sénat, j’ai reçu un appel téléphonique d’un assistant de la Maison Blanche m’informant que ma nomination au poste de directeur du CDC était retirée, parce qu’il n’y avait pas assez de votes pour que je sois confirmé. J’ai ensuite parlé au secrétaire du HHS, Bobby Kennedy, qui était très contrarié. On lui a dit la même chose. Il s’était réjoui de travailler avec moi au CDC. Il a dit que j’étais la personne idéale pour ce poste.

Bobby m’a dit que, plus tôt dans la matinée, il avait déjeuné avec la sénatrice républicaine du Maine, Susan Collins, qui lui avait dit qu’elle avait désormais des réserves quant à ma nomination et qu’elle envisageait de voter contre. J’avais eu avec elle deux semaines auparavant une réunion très agréable, au cours de laquelle elle n’avait exprimé aucune réserve. Mais lors de ma rencontre avec son équipe le 11 mars, elle s’était montrée soudainement très hostile – un mauvais signe.

Ils m’ont accusé à plusieurs reprises d’être « antivax », même si je leur ai rappelé que j’administrais des centaines de vaccins chaque année dans le cadre de ma pratique médicale. Il y a plus de vingt ans, alors que je siégeais au Congrès,  j’avais soulevé des questions concernant la sécurité des vaccins pour les enfants et, pour une raison ou une autre, l’équipe de Collins n’avait pas pu les admettre, quoi que j’aie dit en retour.

La commission compte 12 républicains et 11 démocrates. En perdre un ne pose donc pas de problème si tous les démocrates votent contre, ce qu’ils ont fait. Je suppose que l’équipe de la Maison Blanche a fait retirer ma nomination parce que le président républicain, le Dr Bill Cassidy de Louisiane, a également voté contre.

Ironiquement, il est interniste comme moi, je le connais depuis des années, et je pensais que nous étions amis. Mais lui aussi a prétendu que j’étais « antivax » ou que je pensais que les vaccins causaient l’autisme, ce que je n’ai jamais dit. Il a même demandé un jour que ma nomination soit retirée. Il s’agissait donc d’un gros problème. Et la perte de Collins était manifestement trop importante pour la Maison Blanche. Le président est un homme très occupé qui fait du bon travail pour notre pays et la dernière chose dont il a besoin, c’est d’une controverse sur le CDC.

De nombreuses personnes craignent que les grandes sociétés pharmaceutiques ne soient à l’origine de cette affaire, ce qui est probablement vrai. Il s’agit de l’organisation de lobbying la plus puissante à Washington DC. Elle donne des millions de dollars aux politiciens des deux côtés de l’assemblée. Ils ont également acheté des millions de dollars de publicité dans les journaux, dans les magazines et à la télévision. Pour tout média ou toute organisation, s’attaquer à Big Pharma pourrait être suicidaire.

De nombreux médias sont en fait des porteurs d’eau pour l’industrie pharmaceutique. Big Pharma subventionne aussi généreusement des sociétés médicales, collèges et universités. J’ai appris à mes dépens qu’il ne faut pas se frotter à l’industrie pharmaceutique.

On m’a dit que Big Pharma avait désespérément essayé de se débarrasser de Bobby Kennedy, mais qu’ils  n’y étaient pas parvenu en raison du fort soutien du président Trump. Beaucoup de gens pensent que Big Pharma me craignait plus que Bobby en raison de ma crédibilité et de mes connaissances en science et en médecine. Donc, s’ils devaient vivre avec Bobby pendant 4 ans, ils n’allaient certainement pas avoir lui et moi, et ils ont mis une sérieuse pression sur Collins et sur Cassidy.

Mon grand péché est qu’en tant que membre du Congrès, il y a 25 ans, j’ai eu la témérité de m’attaquer au CDC et aux grandes sociétés pharmaceutiques sur deux questions cruciales relatives à la sécurité des vaccins pour les enfants.

Des centaines de parents étaient venus me voir de tout le pays, insistant sur le fait que leur enfant avait subi de graves dommages à cause des vaccins. Certains affirmaient que les vaccins étaient cause d’autisme. Les parents affirmaient deux choses. La première était que la FDA, le CDC et l’industrie pharmaceutique avaient autorisé une quantité considérable d’un conservateur neurotoxique appelé thimérosal [du mercure] dans le calendrier de vaccination des nourrissons. La seconde était que le thimérosal était la cause du problème.

Sous ma pression et celle de nombreux autres membres de la Chambre, tant démocrates que républicains, le CDC et Pharma ont supprimé le thimérosal neurotoxique, mais il leur a fallu des années pour y parvenir. L’une des choses qui semble avoir uni les membres de la Chambre qui se sont engagés dans cette affaire est qu’aucun d’entre nous n’a reçu d’argent de l’industrie pharmaceutique. Bernie Sanders nous a même soutenus.

Le CDC a fini par publier une étude affirmant que le mercure n’avait pas causé de dommages. Mais des accusations crédibles ont été formulées selon lesquelles le CDC avait manipulé les données pour se disculper. En cas de confirmation, j’avais l’intention d’étudier à nouveau la base de données du CDC et d’enquêter discrètement sur cette allégation.

Paradoxalement, j’espérais ne trouver aucune preuve de corruption de la science au CDC. Peut-être qu’en l’entendant de ma bouche, le public serait rassuré et que cela contribuerait à améliorer l’image quelque peu ternie du CDC et de l’industrie pharmaceutique.

Mais j’ai malheureusement eu aussi la témérité de m’attaquer au CDC et à l’industrie pharmaceutique à propos d’un autre problème de sécurité des vaccins destinés aux enfants, à savoir la sécurité du vaccin contre la rougeole appelé R.O.R [rougeole-oreillons-rubéole]. Il y a plus de 25 ans, une série d’articles a été publiée par un pédiatre gastro-entérologue britannique du nom d’Andrew Wakefield. Il avait rencontré de nombreux parents qui affirmaient qu’après avoir reçu le vaccin R.O.R, leur enfant non seulement avait vu son développement se détériorer, mais aussi qu’il était devenu capricieux pour la nourriture et qu’il avait développé des diarrhées. Wakefield a effectué des coloscopies sur les enfants et a découvert qu’ils souffraient d’une nouvelle forme de maladie inflammatoire de l’intestin. Ses recherches ont été reproduites par la suite et, à ce jour, on lui attribue la définition de cette forme de maladie inflammatoire de l’intestin chez l’enfant.

Wakefield a publié en tout 15 articles. Un seul a été retiré. Celui qui a suscité la plus grande controverse a été publié dans une revue appelée Lancet. L’un des co-auteurs de l’article était un virologue irlandais très respecté du nom d’ O’Leary. En fait, je connaissais O’Leary. Je m’occupais de patients atteints du SIDA avant de me rendre au congrès et je connaissais la réputation de scientifique chevronné d’ O’Leary. L’une des complications dont souffraient les malades du SIDA était une forme de cancer appelée sarcome de Kaposi. Et O’Leary avait montré que le cancer apparaissait chez les malades du SIDA en cas de co-infection par un second virus appelé herpès simplex de type 8.

Wakefield a décidé de donner certains échantillons de biopsies du côlon à O’Leary qui a pu montrer, à l’aide d’une technique appelée P.C.R, que les biopsies de maladies inflammatoires de l’intestin de ces enfants contenaient les virus de la souche de rougeole contenue dans le vaccin. Le virus vivant contenu dans le vaccin est censé être atténué et ne pas provoquer de maladie.

Cela suggère que les enfants n’étaient pas en mesure de gérer les particules virales et que cela provoquait dans leurs intestins une infection qui pouvait également affecter leur système nerveux central et provoquer des symptômes autistiques.

Lorsque cet article a été publié, des milliers de parents britanniques ont commencé à refuser le vaccin R.O.R, et des épidémies de rougeole ont éclaté.

Les autorités sanitaires britanniques avaient fort à faire. Elles ont décidé de faire retirer l’article de la revue Lancet et ont obtenu qu’ O’Leary retire les résultats de ses recherches. J’ai suivi tout cela de près, j’ai rencontré O’Leary et j’ai examiné les micrographies de sa biopsie et les résultats de sa PCR. Il me semblait bien que les particules vaccinales étaient à l’origine du problème chez ces enfants et j’ai été surpris qu’ O’Leary retire ses affirmations.

J’ai ensuite appelé O’Leary au téléphone et lui ai demandé pourquoi il faisait cela. Il y a eu une très longue pause. Il a ensuite déclaré qu’il lui avait fallu de nombreuses années pour arriver à la place qu’il occupait dans la communauté scientifique. Et, après une autre pause, il a ajouté qu’il avait quatre enfants en bas âge à la maison.

J’avais moi-même à l’époque des enfants en bas âge à la maison, et j’ai compris ce qu’il disait. S’il ne le faisait pas, il allait être licencié. Il allait être ruiné.

Les autorités britanniques ne se sont pas contentées d’obtenir que la revue retire l’article et que le Dr O’Leary retire ses allégations. Elles ont alors décidé d’entamer une procédure visant à retirer sa licence médicale au Dr. Wakefield ainsi qu’à l’un de ses principaux co-auteurs.

À ce moment-là, Wakefield avait déménagé aux États-Unis et se défendre devant les tribunaux lui aurait coûté des centaines de milliers de dollars. Il a donc laissé les autorités lui retirer sa licence. Mais son principal co-auteur, le Dr Simon Murch, exerçait toujours la médecine en Angleterre et a décidé de se défendre devant les tribunaux. Le gouvernement a perdu et n’a pas pu lui retirer sa licence.

Si Wakefield avait eu l’argent nécessaire pour se défendre, il n’aurait jamais perdu sa licence. Les documents judiciaires montrent clairement que Wakefield et ses co-auteurs n’ont rien fait de contraire à l’éthique ni d’inapproprié et que leurs travaux étaient tout à fait valables.

Les grandes sociétés pharmaceutiques n’avaient pas besoin de plus. Elles pouvaient dire et faire savoir aux médias que l’article avait été retiré et que Wakefield avait perdu sa licence. Mais j’ai regardé les micrographies et il me semblait bien qu’il y avait des particules de rougeole de souche vaccinale qui infectaient les intestins de ces enfants.

Le CDC a été chargé de reprendre les recherches de Wakefield et de montrer que le vaccin contre la rougeole était sûr. Mais il ne l’a jamais fait de la bonne manière. Ils ont décidé de mener des études épidémiologiques au lieu d’une étude clinique. Une fois de plus, comme dans l’étude sur le mercure, on a prétendu qu’il y avait des indicateurs d’un problème avec le R.O.R. Le CDC a de nouveau été accusé de modifier le protocole et l’analyse des données jusqu’à ce que l’association disparaisse.

Ironiquement, j’ai parlé à Wakefield après que tout cela se soit terminé. Il était d’accord avec moi pour dire que nous devions vacciner nos enfants contre la rougeole. Il pensait que la solution était d’administrer le vaccin à un âge un peu plus avancé, comme c’est le cas dans de nombreux pays européens. Ou alors, nous pourrions faire des recherches et comprendre pourquoi certains enfants réagissent mal au R.O.R.

Manifestement, les grandes sociétés pharmaceutiques ne voulaient pas que je fasse des recherches au CDC sur ce sujet.

Il y a beaucoup d’autres choses ironiques dans tout cela. Je pense que le CDC est principalement composé de personnes très compétentes qui se soucient réellement de la santé publique de notre pays, même si sa crédibilité a été sérieusement ternie en raison des échecs dans la manière de gérer la crise de la COVID-19. 40 % des démocrates et 80 % des républicains ne font pas confiance au CDC. Nombreux sont ceux qui ne font pas non plus confiance aux laboratoires pharmaceutiques. Je voulais vraiment essayer de faire du CDC une agence meilleure et plus respectée. Et l’annulation de ma nomination pourrait avoir l’effet inverse : la méfiance pourrait s’aggraver.

J’ai également beaucoup de respect pour l’industrie pharmaceutique. Je pratique la médecine interne et utilise pour soigner mes patients des médicaments qui ont été inventés par des sociétés pharmaceutiques américaines. Je peux vous dire de première main qu’ils sont très efficaces et qu’ils aident beaucoup de gens. Les nouveaux médicaments sont scandaleusement chers, mais une fois qu’ils ne sont plus brevetés, ils peuvent devenir très abordables et sauver la vie de nombreuses personnes souffrant de maladies chroniques ou aiguës.

Malheureusement, l’industrie que j’utilise quotidiennement pour aider mes patients me voit d’un très mauvais Å“il. Bobby Kennedy est un homme bon qui est vraiment passionné et qui a vraiment à cÅ“ur l’amélioration de la santé du peuple américain. Le président Trump a bien fait de le nommer secrétaire au ministère de la Santé et des services sociaux. J’espère qu’ils trouveront pour le CDC quelqu’un qui pourra être confirmé et avoir l’aval de l’industrie pharmaceutique.

Dr. Dave Weldon MD
Mars 2025

Notes et sources

(*) Selon Associated Press, c’est la première fois qu’un futur directeur des CDC devait passer une audition devant le Sénat pour être confirmé à son poste (une loi a été votée en ce sens sous Biden). 
Voir : Trump administration withdraws CDC director nomination just before Senate hearing, Associated Press, 13 mars 2025:
https://apnews.com/article/dave-weldon-cdc-director-9a3d061832e2f0f644f2c58fbae36965
(**) Déclaration officielle de l’honorable Dave WELDON MD concernant le retrait récent de sa nomination au poste de directeur du CDC
 :
https://www.statnews.com/wp-content/uploads/2025/03/Dave-Weldon-statement.pdf